Cartographie de la qualité de l’air : SESAM, le nouvel outil pour utiliser les mesures de capteurs à bas coût

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Les instruments miniaturisés et à bas coût sont de plus en plus utilisés pour mesurer la qualité de l’air ambiant et leur déploiement offre une couverture spatiale et temporelle d’observation inédite. L’outil SESAM (data fusion with SEnSors for Air quality Mapping) a été développé par l’Ineris dans le cadre de ses travaux pour le Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air (LCSQA), pour cartographier des concentrations de polluants à l’échelle urbaine, en fusionnant ces nouvelles observations avec celles issues de méthodes plus conventionnelles et les calculs d’un modèle de qualité de l’air.

La qualité de l’air représente un enjeu majeur de notre société. L’impact de la pollution de l’air ambiant est bien connu pour ses effets sur la santé humaine et les écosystèmes. La cartographie de la qualité de l’air est un vecteur d’information du public et permet l’indentification des leviers d’action pour la réduction des émissions de polluants. Les stations de référence opérées par les Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) permettent d’observer de manière fiable et normalisée les concentrations de polluants, mais leur déploiement sur un territoire vaste comme la France reste soumis à des contraintes de coût et de maintenance qui limitent la couverture de ce réseau. Là où les mesures n’existent pas, les modèles sont généralement utilisés pour calculer les concentrations de polluants à l’échelle régionale et locale. Ils prennent en compte les émissions de polluants (trafic, industrie, agriculture, résidentiel…) et les conditions météorologiques, pour estimer de façon plus ou moins complexe la dispersion et la transformation chimique des polluants. Ces modèles présentent néanmoins des incertitudes, du fait de la qualité des données d’entrée, de leur résolution spatiale ou de la représentation imparfaite des processus ; il convient donc de les corriger, en utilisant autant que possible les observations.

Des capteurs à bas coûts pour mesurer la qualité de l’air

image d'un capteur et d'une station de référénce

Capteur / Station de référence

Ces cinq dernières années, de nouveaux instruments de mesure miniaturisés et à bas coût ont fait leur apparition. Il s’agit de capteurs dont l’utilisation est aujourd’hui en plein essor. Ces instruments peuvent être déployés en grand nombre pour accéder à une observation de la variabilité spatio-temporelle des polluants avec une résolution fine. Ils peuvent être installés sur du mobilier urbain, pour fournir une mesure fixe, ou sur des véhicules de service, des ambulances, des voitures auto-école ou des vélos, et mesurer les concentrations de polluants, tout en étant en mouvement. Cela ouvre ainsi de nouveaux horizons pour améliorer les cartographies de la qualité de l’air à l’échelle urbaine. Toutefois, l’utilisation de ces capteurs soulève un bon nombre de défis. Du fait de leur miniaturisation et de leur métrologie simplifiée, ces capteurs sont associés à une plus grande incertitude de mesure, parfois supérieure d’un ordre de grandeur à celle des stations de référence. A cela, s’ajoute l’effet de la mobilité, dont l’impact sur la mesure est encore peu étudié. Par ailleurs, la quantité de données produite nécessite d’appliquer de nouveaux modes de traitement des données, faisant appel au big data.
Considérant les enjeux liés à l’émergence de ces nouvelles technologies, l’Ineris et le LNE se sont engagés dans la mise au point d’un processus de certification volontaire, « AIR Quality Sensor », permettant de valider le niveau de performance métrologique des capteurs selon des critères réglementaires

L'outil SESAM

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La fusion de données de capteurs à bas coûts et des simulations issues de modèles de dispersion est une opportunité unique pour fournir de meilleures cartographies de la qualité de l’air à l’échelle urbaine. L’outil SESAM permet pour la première fois, de fusionner les observations de capteurs fixes et mobiles, avec les estimations d’un modèle urbain, tout en considérant l’incertitude intrinsèque des capteurs dans la cartographie. Une application de l’outil SESAM a été réalisée à Nantes, par la fusion des données des capteurs de la société AtmoTrack et des sorties du modèle de dispersion ADMS-Urban, fournies par Air Pays de la Loire. Comme illustré sur la figure ci-dessous, elle permet, à partir d’une première estimation sur la zone (ici une moyenne annuelle), de prendre en compte les données remontées à un instant donné par des capteurs sur le terrain. Cette application a fait l’objet d’une publication scientifique dans le journal Environment International. Un guide d’utilisation de l’outil vient également d’être publié par le LCSQA. Les efforts de développement continuent pour soutenir l’innovation dans cette direction avec une thèse en cours à l’Ineris, en codirection avec le centre de géostatistique de Mines ParisTech.

L’outil SESAM est appliqué à Nantes, à partir des capteurs positionnés sur des véhicules de service. Ces véhicules se déplacent et mesurent toutes les 10 secondes environ, la concentration de particules fines dans l’air ambiant entre 8h et 9h du matin le 29 novembre 2018. Les concentrations ainsi mesurées et les calculs du modèle de dispersion (ici la moyenne annuelle 2016 présentée en fond), sont fusionnés pour obtenir une cartographie plus précise des concentrations des PM10 dans l’agglomération nantaise.