Transport

Le secteur intègre d’une part, les sources routières des différentes catégories de véhicules et d’autre part, les sources non routières. Ces dernières incluent les transports aérien, ferroviaire, maritime (dont pêche), fluvial de marchandises et autres modes de navigation (bateaux de plaisance et autres petits bateaux).

Ce secteur est la source clé des émissions des gaz à effet de serre, notamment dues aux émissions de CO2 du transport routier. Ces émissions sont globalement stables depuis la dernière décennie.
Concernant les polluants atmosphériques, les émissions de l’ensemble des transports ont diminué la dernière décennie grâce au renouvellement du parc des véhicules routier (source : rapport SECTEN 2021 du Citepa).

Les travaux de l’Ineris de ces cinq dernières années dans ce secteur se sont concentrés sur le trafic maritime et la détermination des émissions d’espèces semi-volatiles organiques aux échappements des véhicules légers.

 

Réduire les émissions polluantes des navires en Méditerranée

L’Ineris a conduit en 2019, en partenariat avec le Citepa, le Cerema et Plan Bleu, une étude visant à définir la faisabilité de la mise en place de zones « basses émissions » dites « Emission Control Area (ECA) » concernant les oxydes de soufre et d’azote émis par les navires croisant en mer Méditerranée. C’est le projet Ecamed.

L’objectif de ce travail était d’étudier l’impact sur la qualité de l’air du déploiement de mesures privilégiant l’usage de carburant à basse teneur en soufre – 0,1 % au lieu de 0,5 %, qui correspond à la valeur désormais obligatoire depuis le 1er janvier 2020 sur toutes les mers du globe, en vertu d’une décision de l’Organisation Maritime Internationale (OMI) – et de motorisations plus propres dites “Tier III” plus faiblement émettrices d’oxydes d’azote, pour les plus gros navires de croisière et de marchandises.

Des scénarios ont été élaborés associant aux données du trafic maritime actuel en Méditerranée des hypothèses de réduction des facteurs d’émissions. Ils ont été utilisés par l’Ineris pour simuler, à l’aide du modèle CHIMERE, leur impact sur les niveaux de polluants atmosphériques : ozone, particules fines, dioxyde de soufre et dioxyde d’azote. Il apparaît que le scénario le plus ambitieux – usage de carburant à 0,1 % de soufre et 100 % de navires équipés de moteurs Tier III – permettrait de réduire notablement les concentrations moyennes annuelles de dioxyde d’azote sur l’ensemble des pays méditerranéens (jusqu’à 70 % de réduction localement).
Les niveaux de particules et d’ozone pourraient également être réduits de 10 %.

Le Citepa a estimé les coûts de ces mesures tandis que l’Ineris évaluait leurs bénéfices sanitaires en termes de mortalité et de morbidité. Ces derniers ont été monétisés pour être comparés aux coûts investis et de maintenance. Il s’avère que la fourchette basse des bénéfices (de l'ordre de 8 M€/an) est toujours supérieure à la fourchette haute des coûts (de l'ordre de 3 M€/an), ce qui démontre l’intérêt de la mise en place d’une zone ECA en mer Méditerranée.

> ECAMED : étude de faisabilité technique de la mise en œuvre d’une zone de réduction des émissions des navires (ECA) en Méditerranée
> ECAMED: a Technical Feasibility Study for the Implementation of an Emission Control Area (ECA) in the Mediterranean Sea

En 2019, le ministère chargé de l’environnement s’est appuyé sur ces travaux auprès des pays signataires de la Convention de Barcelone, traité onusien pour la protection de la Méditerranée, et de l’Organisation maritime internationale (OMI) pour promouvoir cette idée afin d’améliorer la qualité de l’air dans les villes portuaires du bassin. Les Parties ont adopté un accord pour saisir l’OMI en 2022 afin d’organiser la mise en place d’une zone « basses émissions ciblées sur les oxydes de soufre ».

Caractériser les émissions des engins non routiers

Les engins mobiles non routiers restent des sources de pollution potentiellement importantes car relativement peu réglementées et très nombreuses. L’objectif du projet EMNR (Caractérisation des émissions des engins mobiles non routiers - 2012-2014), financé par l'Ademe, mené par l’Ineris, l’Irstea (Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture) et le Citepa, avait pour but de contribuer à objectiver ces émissions. Deux tronçonneuses (correspondant respectivement aux phases 1 et 2 de la directive 2002/88/EC) et deux tracteurs (correspondant respectivement aux phases IIIa et IIIb de l’arrêté du 28 septembre 2005) ont été testés par l’Ineris et l’Irstea sur bancs d’essais à l’Irstea. Les polluants réglementaires classiques (oxydes d’azote (NOx), composés organiques volatils non méthaniques (COVNM), particules et monoxyde de carbone (CO)) ainsi que d’autres composés tels que les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), la granulométrie en masse et en nombre des particules et la caractérisation chimique détaillée des composés organiques volatils et semi volatils émis ont été caractérisés. Une campagne de mesurage des polluants gazeux réglementaires a de plus, été réalisée en situation réelle d’usage d’un des tracteurs. Des facteurs d’émissions ont été déterminés par l’Irstea, sur la base de ces essais pour les tronçonneuses et les tracteurs testés. Plusieurs tests ont ensuite été réalisés par le Citepa pour appréhender les écarts que génèrerait l’utilisation de facteurs d’émission issus de mesures pour la réalisation des inventaires comparés à l’utilisation des valeurs limites d’émission (VLE), comme c’est le cas actuellement.

> Projet ADEME CORTEA - Engins Mobiles Non-Routiers (EMNR)
 

Caractériser les émissions des véhicules légers : focus sur les émissions de HAP et de particules

Le secteur des transports routiers contribuait en 2017 à hauteur de 15 % aux émissions d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) en France, faisant de lui le second contributeur à la présence de ces composés toxiques dans l'air ambiant après le secteur tertiaire/résidentiel (63 %). Ces émissions, bien que fortement réduites suite à l'introduction massive des catalyseurs automobiles, tendent dorénavant à se stabiliser voire à croître légèrement en raison notamment de la croissance du parc automobile.
Parmi ces HAP, une douzaine est classée cancérogène probable ou possible (groupes 2A et 2B de l’IARC) pour l’homme, le benzo[a]pyrène étant considéré cancérigène certain (groupe 1, IARC). Leurs dérivés nitrés et oxygénés (nitro-HAP et oxy-HAP) sont probablement aussi toxiques que leurs HAP parents avec des propriétés cancérigènes et mutagènes, et leur présence en phases gazeuse et particulaire accroît d’autant plus les risques pour la santé humaine. Enfin, les HAP volatils ou semi-volatils, présents en phase gazeuse ou partagés entre les deux phases, sont des précurseurs majeurs de la formation d’aérosols organiques secondaires (SOA).

Le projet RHAPSODIE (2017-2020) mené par l’IFPEN (Institut Français du Pétrole Énergies nouvelles) et l’Ineris avec le soutien de l’Ademe, avait pour objectifs d’étudier les émissions polluantes de premiers véhicules série équipés des technologies de réduction des émissions satisfaisant les dernières normes anti-pollution (Euro 6 dTEMP notamment), spécifiquement calibrés en vue d’une homologation selon la procédure WLTP  incluant la prise en compte de l’usage réel (Real Driving Emissions, RDE). Le projet ciblait en particulier :

  • les HAP et leurs dérivés nitrés et oxygénés, ainsi que leur répartition entre phases gazeuse et particulaire;
  • les polluants primaires gazeux règlementés et certains non réglementés;
  • les particules (masse et nombre), leur taille, ainsi que leur composition et leur évolution temporelle.

Le projet s’est appuyé sur des conditions expérimentales variées, basées sur le cycle harmonisé mondial (WLTC), le cycle ARTEMIS (CADC), ainsi que sur la reproduction au banc à rouleau de conditions de roulage plus représentatives de conditions réelles (cycle RDE homothétique), en tentant également d’évaluer l’impact :

  • des conditions de démarrage (fluides moteur à température ambiante ou chauds) ;
  • des conditions de roulage (urbaines, routières ou autoroutières) ;
  • des phases de régénération active des filtres à particules.

Trois berlines compactes (même modèle), équipées de motorisations essence injection directe avec et sans filtre à particules (GPF) et diesel avec fonction SCR sur filtre à particules (SCRF), ont été sélectionnées pour leur représentativité du marché automobile français actuel et à venir afin d’en évaluer les émissions gazeuses et particulaires, qu’elles soient réglementées ou non.

> Le projet Rhapsodie en bref
 

Le travail se poursuit dans le cadre du projet RHAPSODIE 2 (2020-2022) financé par l'Ademe, qui s’intéresse à l’impact de différents bio-carburants sur les émissions d’un véhicule Diesel.  Pour cela, le protocole analytique devra être reproduit et si possible encore amélioré.

En outre, la détermination des facteurs d'émission (EF) des composés organiques par classe de volatilité, a été réalisée, en collaboration avec l’Université Gustave Eiffel dans le cadre du projet Ademe EVORA (Détermination des émissions d’espèces semi-volatiles organiques par classe de volatilité - Impact sur la modélisation de la qualité de l’air) (2018-2022). Les émissions des véhicules légers de normes d’émissions Euro 3 à Euro 5 (diesel et essence) ont été caractérisées lors de tests sur bancs à rouleaux selon plusieurs cycles de conduite normalisés (Artemis urbain chaud, Artemis autoroutier et WLTC (Worldwide harmonized Light vehicles Test Cycles, avec démarrage à température ambiante)) et avec des prélèvements effectués après dilution (CVS : constant volume sampling ou FPS : Fine Particle Sampler).

L’objectif de ce projet est aussi, à terme, de caractériser l’impact des émissions véhiculaires de IVOC (composés organiques de volatilité intermédiaire) sur la formation d’AOS (aérosol organique secondaire) dans l’air ambiant à l’échelle du territoire français/européen à l’aide d’outils de modélisation (modèle 3D chimie-transport CHIMERE après mise à jour des inventaires d’émission par le Citepa (Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique)).

Les résultats préliminaires montrent pour les véhicules essences Euro 4 et 5, une part conséquente des émissions d’IVOC du même ordre de grandeur que ceux rapportés dans des études américaines ou chinoises. En revanche, la contribution et les facteurs d’émission en valeur absolue obtenus sont bien plus faibles pour les véhicules diesel notamment pour les plus modernes (Euro 5).

 

graphique

 

Figure 1 : Distribution relative par classe de volatilité des composés organiques émis par des véhicules légers essence ou diesel Euro 3 et Euro 5. Répartition entre les composés organiques volatils (VOCs, nombre de carbones, 10 ≥ nC ≥ 7), composés organiques de volatilité intermédiaire (IVOCs, 16 ≥ nC ≥ 11) et composés organiques semi-volatils (SVOCs, 25 ≥ nC ≥ 17). Résultats pour la phase gazeuse uniquement, tous cycles de conduite testés confondus (Artemis urbain chaud, Artemis autoroutier et WLTC (cycle harmonisé mondial avec démarrage à température ambiante)). Résultats préliminaires du projet Ademe EVORA.

L’Ineris également présent dans les enceintes ferroviaires souterraines

L’ineris a produit un guide de recommandations pour la réalisation de mesures harmonisées de la qualité de l'air dans les enceintes ferroviaires souterraines. Ce guide fournit des recommandations pour la réalisation de mesures harmonisées de la qualité de l’air dans les enceintes ferroviaires souterraines (EFS).
Son objectif est de permettre d’acquérir des données sur les niveaux de pollution pouvant être observés dans les EFS, selon une approche commune faisant l’objet d’un consensus au sein d’un groupe de travail présidé par le ministère chargé de l’environnement et rassemblant plusieurs opérateurs ferroviaires, autorités organisatrices, ministères ainsi que l’Ineris. Les mesures concernent l’atmosphère des quais situés en souterrain et des habitacles des rames y circulant. Elles visent à y caractériser les niveaux des concentrations de certains polluants auxquels les voyageurs sont exposés, principalement les particules PM10 et PM2.5, et les métaux présents dans les particules PM10.
Les recommandations concernent différents volets :

  • les informations à collecter préalablement et pendant les campagnes de mesures ;
  • la sélection des quais à instrumenter, la stratégie de mesure associée et le format de restitution des données ;
  • la sélection des rames à instrumenter et la stratégie de mesure associée et le format de restitution des données.

> Le guide Recommandations pour la réalisation de mesures harmonisées de la qualité de l'air dans les enceintes ferroviaires souterraines