(BO du MEDDE  n° 2014/5 du 25 mars 2014)


NOR : DEVL1402788J

Le ministre de l’intérieur,
Le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie,
La ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique,
La ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation,

à

Pour exécution

Préfets de département de métropole et outre-mer
Direction générale des collectivités locales (DGCL)
Direction générale l’aménagement, du logement et de la nature / Direction de l'eau et de la biodiversité (DGALN/DEB)

Pour information

Préfets de région
Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA)
Agences de l’eau
Offices de l’eau
Secrétariat général du gouvernement
Secrétariat général du METL et du MEDDE

Résumé : précisions sur le champ d’application, le calendrier et les modalités de l’expérimentation en vue de favoriser l’accès à l’eau et de mettre en oeuvre une tarification sociale de l’eau suite à l’article 28 de la loi du n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes

 

 

 

Catégorie : Domaine :
Mots clés liste fermée : Mots clés libres : accès à l’eau, tarification sociale, expérimentation, services publics d’eau et d’assainissement

Texte de référence
Loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes

Date de mise en application : dès publication
Pièce(s) annexe(s) :
- dispositions en vigueur qui peuvent être mises en oeuvre sans avoir recours à l’expérimentation (fiche n°1) ;
- dispositions dérogatoires au droit commun (fiche n°2) ;
- travail préparatoire à la demande d’expérimentation (note de présentation et étude détaillée) (fiche n°3) ;
- évaluation de l’expérimentation par la collectivité (fiche n°4) ;
- article 28 de la loi du 15 avril 2013 relatif à l’expérimentation sur l’eau (annexe).
N° d’homologation Cerfa :
Publication   BO Site Circulaires.gouv.fr

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La présente instruction a pour objet de préciser le champ d’application, le calendrier et les modalités de l’expérimentation prévue par l’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes.

Cet article introduit, pour les collectivités qui le souhaitent, la possibilité d’une expérimentation en vue « de favoriser l’accès à l’eau et de mettre en oeuvre une tarification sociale de l’eau ».

Cette expérimentation est fondée sur le quatrième alinéa de l’article 72 de la Constitution qui permet aux collectivités territoriales ou à leurs groupements de déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires régissant l’exercice de leurs compétences.

L’expérimentation permettra aux services de définir, de mettre en oeuvre et d’évaluer des solutions adaptées à leur contexte local afin de rendre effectif, sur leur territoire, le droit à l’eau potable des personnes physiques, issu de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques (fiche n°1). L’article L. 210-1 du code de l’environnement dispose en effet que « (…) chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ».

A l’issue de l’expérimentation, le bilan des mesures mises en place doit permettre, s’il est concluant, de dégager des solutions généralisables à l’ensemble des communes et de leurs groupements compétents en matière d’eau potable et d’assainissement.

En application des articles L.O. 1113-1 à L.O. 1113-7 du code général des collectivités territoriales (CGCT) relatifs aux expérimentations, l’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 susmentionnée précise :
- l’objet de l’expérimentation (I) ;
- la nature juridique et les caractéristiques des collectivités territoriales ou de leurs groupements autorisés à participer à l'expérimentation (II) ;
- la durée de l’expérimentation, le délai pour présenter sa candidature, ainsi que des éléments généraux sur la procédure (III).

La présente instruction comporte quatre fiches d’information et une annexe.

I) L’objet de l’expérimentation

L’expérimentation concerne les tarifs de fourniture d’eau et/ou son assainissement aux seules personnes physiques, abonnées directement au service, ou résidant dans un immeuble à usage principal d’habitation abonné au service.

En vertu du 2ème alinéa de l’article 28, l'expérimentation peut porter sur la définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer (« tarification sociale de l’eau »), l'attribution d'une aide au paiement des factures d'eau (aide « curative ») ou d'une aide à l'accès à l'eau (aide « préventive »), dans des conditions économiquement acceptables par tous, c’est-àdire tant par les différentes catégories d’usagers que par le service.

II) La nature juridique et les caractéristiques des collectivités autorisées à participer à l'expérimentation

L’expérimentation est engagée par « les collectivités territoriales organisatrices des services d’eau et d’assainissement, les groupements auxquels elles ont transféré cette compétence et les départements qui le demandent » (alinéa 3 de l’article 28).

Elle s’adresse aux collectivités territoriales (communes, départements) ou à leurs groupements assurant tout ou partie des missions constituant un service public d’eau potable ou d’assainissement au sens de l’article L. 2224-7 du CGCT. Les départements sont également concernés au regard de leur compétence en matière d’aides sociales.

Conformément à l’article 72 de la Constitution, cette possibilité d’expérimentation est ouverte aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 74.

Dans le cas où des communes et groupements en charge de différentes missions constituant les composantes d’un même service public (ex. : production et distribution d’eau potable) sur un territoire souhaitent participer à l’expérimentation, il est souhaitable qu’ils définissent ensemble des dispositifs concordants.

Par ailleurs, les collectivités territoriales et leurs groupements autorisés à participer à l’expérimentation devront être, dans la mesure du possible, représentatifs de différentes typologies de services (ex. : secteurs urbains, touristiques, ruraux, etc.).

En outre, l’article 27 de la loi n°2013-312 du 15 avril 2013 a complété l’article L. 2224-12-1 du CGCT en identifiant la catégorie d’usagers spécifique des ménages, occupants d’immeubles à usage principal d’habitation, catégorie sur laquelle peut être mise en oeuvre l’expérimentation.

Les dispositions dérogatoires au droit commun sont explicitées dans la fiche n°2 de cette instruction.

III) La procédure

L’expérimentation est engagée pour une période de 5 années à compter de la date de la promulgation de la loi, et donc jusqu’au 16 avril 2018.

a) Une délibération de la collectivité / du groupement candidat à l’expérimentation Toute collectivité ou groupement qui le souhaite demande, par délibération de son assemblée délibérante, à participer à l’expérimentation. Cette délibération mentionne les dispositions législatives auxquelles la collectivité souhaite déroger, le dispositif qu’elle souhaite mettre en place ainsi que sa durée de validité (article L.O. 1113-3 du CGCT).

La délibération est transmise au préfet du département du siège de la collectivité candidate à l’expérimentation accompagnée, le cas échéant, de l’avis de la commission consultative des services publics locaux (CCSPL) créée en application de l’article L. 1413-1 du CGCT.

Lorsque le périmètre d’un groupement de communes s’étend sur plusieurs départements, le groupement adresse sa demande au préfet du département de son siège. Ce dernier en informe les préfets des autres départements concernés.

En application de l’article 28, la collectivité ou le groupement informe l’agence de l’eau ou l’office de l’eau de sa candidature.

En outre, il est souhaitable que le candidat accompagne sa demande d’une note de présentation générale du projet d’expérimentation (fiche n°3).

Les demandes d’expérimentation doivent être transmises aux préfets de département avant le 31 décembre 2014.

b) La publication de la liste des collectivités participant à l’expérimentation

En application de l’article L.O. 1113-2 du CGCT, le préfet de département adresse la demande, accompagnée de ses observations, au ministre chargé des collectivités territoriales, à savoir le ministre de l’intérieur (direction générale des collectivités locales).

Le Gouvernement vérifie que les conditions légales sont remplies et publie, par décret, la liste des collectivités territoriales autorisées à participer à l'expérimentation. Le Gouvernement procéderait à au minimum deux publications.

En outre, le Gouvernement publie les délibérations portant dérogation aux dispositions législatives au Journal officiel de la République française, leur entrée en vigueur étant subordonnée à cette publication (article L.O. 1113-3 du CGCT).

c) Les partenaires potentiels de l’expérimentation

En application de l’article 28 de la loi du 15 avril 2013, peuvent être associés à la définition, au suivi et à l’évaluation de l’expérimentation, « les gestionnaires assurant la facturation des services d’eau et d’assainissement concernés, le département, les agences de l’eau et, dans les départements d’outre-mer, les offices de l’eau, les associations de gestionnaires publics ou privés d’immeubles d’habitation, les associations de locataires, les organismes de gestion du logement social dans les collectivités territoriales concernées et, le cas échéant, les caisses locales d’allocations familiales gestionnaires des aides au logement. ».

d) Le suivi et l’évaluation de l’expérimentation

Au plan national

Le suivi de l’expérimentation sera assuré par le ministère de l’intérieur et le ministère de la réforme de l’Etat, de la décentralisation et de la fonction publique avec l’appui de la direction générale des collectivités locales, ainsi que par le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie avec l’appui de la direction de l’eau et de la biodiversité.

En application de l’article 28, le comité national de l’eau est également chargé du suivi et de l’évaluation de l’expérimentation et pourra demander un appui à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA). Les rapports qui seront successivement élaborés par ses soins seront transmis aux collectivités territoriales concernées, pour observations.

Au plan local

En application de l’article 28, les collectivités doivent évaluer l’expérimentation mise en place au sein du rapport annuel sur le prix et la qualité du service public de l’eau défini à l’article L. 2224-5 du CGCT, en « établissant une partie chiffrant les coûts de gestion rendus nécessaires par la mise en oeuvre du dispositif d'aide sociale, afin de les comparer au volume d'aides apportées ».

Un arrêté interministériel du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé de l'écologie, du développement durable et de l'énergie fixera les postes de coûts devant nécessairement figurer dans ce chiffrage.

Il serait utile que la collectivité définisse en amont l’organisation du suivi et de l’évaluation de l’expérimentation, qui doivent porter sur les coûts des mesures mais qui pourraient s’étendre utilement à l’examen de l’efficacité de ces mesures (fiche n°4).

Vous trouverez ci-joint quatre fiches d’information et une annexe portant sur :
- les dispositions en vigueur qui peuvent être mises en oeuvre sans avoir recours à l’expérimentation (fiche n°1) ;
- les dispositions dérogatoires au droit commun (fiche n°2) ;
- le travail préparatoire à la demande d’expérimentation (note de présentation et étude détaillée) (fiche n°3) ;
- l’évaluation de l’expérimentation par la collectivité (fiche n°4) ;
- l’article 28 de la loi du 15 avril 2013 relatif à l’expérimentation sur l’eau (annexe).

Nous vous demandons de bien vouloir communiquer ces éléments d’information aux collectivités et groupements qui manifesteraient le souhait de participer à l’expérimentation et, le cas échéant, de les inciter à accompagner leur demande d’une note de présentation générale du projet d’expérimentation (fiche n°3), de préférence sous forme dématérialisée.

Vous transmettrez aux ministères de l’intérieur et de l'écologie, du développement durable et de l'énergie les demandes d’expérimentation accompagnées de vos observations sur les boîtes fonctionnelles :
dgcl-experimentation-eau@interieur.gouv.fr
deb-experimentation-eau@developpement-durable.gouv.fr

Nous vous demandons également de nous faire part, sous les présents timbres, des difficultés éventuelles dans la mise en oeuvre de ces instructions.

La présente instruction sera publiée aux bulletins officiels du ministère de l’intérieur et du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Le 04 mars 2014.

Le ministre de l’intérieur
Manuel Valls

Le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
Philippe Martin

La ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique
Marylise LEBRANCHU

La ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation
Anne-Marie Escoffier

Fiche n° 1

Les dispositions en vigueur qui peuvent être mises en oeuvre sans avoir recours à l’expérimentation

 

L’article L. 210-1 du code de l’environnement instaure un droit à l’eau en disposant que « (…) chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ».

Plusieurs dispositions en vigueur concourent à la mise en oeuvre du droit à l’eau potable. Il s’agit de :

- l’interdiction des demandes de caution ou de versement d’un dépôt de garantie L’article L. 2224-12-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT) interdit les demandes de caution et de versement d’un dépôt de garantie pour les abonnés domestiques.

- la tarification progressive

La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques a confirmé la possibilité d’instituer des tarifs progressifs (III de l’article L. 2224-12-4 du CGCT).

En application du dernier alinéa du III de l’article L. 2224-12-4 du CGCT, il peut être défini, pour les immeubles collectifs d'habitation, un barème particulier tenant compte du nombre de logements.

- les différenciations tarifaires par catégories d’usagers

Les différenciations tarifaires par catégories d’usagers sont admises dans les limites définies par la jurisprudence relative au principe d’égalité des usagers devant le service public.

En outre, l’article 27 de la loi n°2013-312 du 15 avril 2013 a complété l’article L. 2224-12-1 du CGCT en identifiant la catégorie d’usagers spécifique des ménages, occupants d’immeubles à usage principal d’habitation.

Indépendamment de l’expérimentation, la loi autorise la définition d’un tarif (uniforme ou progressif) pour les ménages distinct, par exemple, du tarif appliqué aux activités économiques ayant les mêmes utilisations de l’eau (utilisation de l’eau assimilables aux utilisations à des fins domestiques au sens de l’article R. 213-48-1 du code de l’environnement).

- les aides attribuées par les services aux usagers en situation d’impayés

Les services publics d’eau et d’assainissement bénéficient de plusieurs moyens pour faire face à la situation d’impayés de certains usagers en situation de précarité.

Ils peuvent réaliser, à l’égard des abonnés du service, des admissions en non valeur et des remises gracieuses lorsqu’il s’agit de distributeurs publics ou des abandons de créance lorsqu’il s’agit de distributeurs privés. Cette possibilité ne concerne pas les résidents des immeubles collectifs à usage d’habitation qui ne sont pas directement abonnés au service.

En outre, des aides peuvent être attribuées par le fonds de solidarité pour le logement en partenariat avec le service (Cf. paragraphe suivant), en application de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles.

- l’attribution par le service d’une subvention au fonds de solidarité pour le logement La loi n° 2011-156 du 7 février 2011 relative à la solidarité dans les domaines de l’alimentation en eau et de l’assainissement permet aux services publics de l’eau et de l’assainissement d’attribuer une subvention au fonds de solidarité pour le logement (FSL) afin de contribuer au financement des aides relatives au paiement des charges d’eau des personnes en situation de précarité, qu’elles soient abonnées au service ou occupants d’immeubles collectifs d’habitation devant payer l’eau et l’assainissement dans les charges collectives d’habitation.

Le montant de la subvention du service au FSL ne peut excéder 0,5 % des montants hors taxes des redevances d’eau ou d’assainissement perçues (article L. 2224-12-3-1 du CGCT).

Le gestionnaire du FSL et le service d’eau ou d’assainissement déterminent les règles de calcul ainsi que les modalités d'attribution et de versement de cette subvention aux usagers.

Le droit à l’eau est aujourd’hui principalement assuré par la mise en oeuvre de mécanismes curatifs tels que la délivrance d’aides pour le maintien à la fourniture d’eau par les FSL.

La mise en oeuvre du droit à l’eau dans des conditions économiques acceptables par tous reste donc en partie non résolue.

L’expérimentation doit permettre de dégager des mesures spécifiques à l’égard des personnes ayant les plus faibles revenus pour éviter qu’elles ne se retrouvent en situation d’impayés.

Fiche n° 2

Les dispositions dérogatoires au droit commun

 

1) L’instauration d’un tarif progressif modulé en fonction du nombre de personnes composant le foyer ou des revenus et pouvant inclure une première tranche de consommation gratuite

Le principe

Cette disposition permet de déroger au I et au II de l’article L. 2224-12-4 du CGCT relatif aux modalités de fixation des tarifs de l’eau et de l’assainissement qui prévoit que le tarif de l’eau soit déterminé en fonction du volume réellement consommé par l’abonné, soit sur la base d’un tarif uniforme au mètre cube, soit sur la base d’un tarif progressif.

Cette forme de tarification progressive permet, à des fins environnementales, de discriminer les ménages les plus économes en eau mais peut aussi pénaliser les familles nombreuses, par construction plus consommatrices en eau, et avantager excessivement les résidents secondaires.

L’expérimentation a donc pour objectif de permettre aux collectivités qui le souhaitent d’intégrer une dimension sociale au tarif progressif.

Ainsi, l’expérimentation permet aux collectivités d’instaurer un tarif progressif présentant de nouvelles caractéristiques. Le tarif progressif social peut :
- « inclure une première tranche de consommation gratuite » ;
- « être modulé pour tenir compte des revenus ou du nombre de personnes composant le foyer ».

Les collectivités pourront donc définir un barème, sur la part variable et/ou la part fixe, fondé sur la connaissance des caractéristiques des abonnés (ex. : catégories d’usagers, personnes bénéficiant de minima sociaux, nombre de personnes dans le foyer), de la typologie de l’habitat (ex. : personnes éligibles au logement social) et de leurs consommations.

Les limites

La progressivité du tarif est limitée puisque « le prix au mètre cube de la tranche de consommation supérieure ne peut (…) excéder plus du double du prix moyen du mètre cube pour une consommation de référence fixée par arrêté des ministres chargés de l’environnement et de la consommation ».

L’arrêté interministériel du 6 août 2007 relatif à la définition des modalités de calcul du plafond de la part de la facture d’eau non proportionnelle au volume d’eau consommé fixe la consommation de référence à 120 m3 par logement. Le prix moyen du mètre cube est donc calculé en divisant la somme due pour une consommation de 120m3, hors part fixe, par 120.

Par ailleurs, la définition d’une progressivité tarifaire ne pourra pas introduire une discrimination entre résidents permanents et résidents secondaires, qui ne sont pas dans des situations différentes vis-à-vis du service, en vertu du principe d’égalité des usagers devant le service public (Conseil d’Etat, 28 avril 1993, Commune de Coux).

Les modalités

L’article 28 de la loi susmentionnée ne permet pas en tant que tel l’accès aux fichiers fiscaux.

Néanmoins, les collectivités expérimentatrices peuvent s’appuyer sur les plafonds de revenus pris en compte par des dispositifs d’aides sociales tels que la couverture maladie universelle (CMU) complémentaire ainsi que, pour connaître le nombre de personnes au foyer, et sauf à retenir un mode déclaratif, sur des organismes comme la caisse d’allocations familiales (CAF).

En tout état de cause, l’accès aux données est régi par les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Il conviendra donc de solliciter l’accord de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) chaque fois qu’un projet d’expérimentation impliquera la gestion et le traitement, dans le fichier des abonnés utilisé pour la facturation, d’informations nominatives autres que celles autorisées par la délibération n°80-16 du 6 mai 1980 de la CNIL relative aux traitements automatisés d’informations nominatives concernant notamment la consommation d’eau et les redevances d’assainissement.

2) Le financement par le budget général de tout ou partie du montant de l’aide attribuée pour le paiement des factures d’eau

Cette disposition permet de déroger à l’article L. 2224-2 du CGCT qui définit la règle d’interdiction pour les communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics d’eau et d’assainissement, qui pour autant ne s’applique pas aux communes de moins de 3000 habitants et aux établissements publics de coopération intercommunale dont aucune commune membre n’a plus de 3000 habitants.

Ainsi, les collectivités expérimentatrices pourront attribuer une subvention à leur service d’eau et/ou d’assainissement afin de contribuer en tout ou partie au financement de « l’aide attribuée par le service pour le paiement des factures d’eau des foyers en situation de précarité ou ayant des difficultés de paiement de leurs factures d’eau », par le biais du budget général au titre de l’aide sociale.

3) Le montant maximal de la subvention attribuée au FSL élevé à 2 %

En application de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles, les conseils généraux peuvent, par l’intermédiaire du fonds de solidarité pour le logement (FSL), attribuer des aides relatives au paiement des fournitures d’eau et des charges collectives afférentes aux personnes en situation d’impayés (aides « curatives »).

L’article L. 2224-12-3-1 du CGCT permet aux services publics d’eau et d’assainissement de contribuer, au moyen d’une subvention, au financement de ces aides dans la limite de 0,5 % des montants hors taxes des redevances d’eau et d’assainissement perçues.

L’article 28 de la loi du 15 avril 2013 porte ce montant maximal à 2 % pour les collectivités expérimentatrices.

En l’absence d’intervention du FSL, l’article 28 prévoit que le versement peut être réalisé au centre communal ou intercommunal d’action sociale.

En outre, la collectivité expérimentatrice doit déterminer par convention, en application du 2ème alinéa de l’article L. 2224-12-3 du CGCT, les modalités d’attribution et de versement de cette subvention. Il est vivement conseillé de procéder de la même façon dans le cas où cette subvention serait versée au centre communal ou intercommunal d’action sociale.

4) La possibilité de verser des aides pour l’accès à l’eau (aides « préventives »)

L’article 28 autorise le « versement d'aides pour l'accès à l'eau par les foyers ayant des difficultés de paiement de leurs factures d'eau et dont les ressources sont insuffisantes ».

L’article 28 crée un dispositif qui peut être qualifié de « préventif » puisque le service est fondé à verser des aides devant garantir l’accès à l’eau, qui sont destinées à des personnes en difficulté financière qui ne sont pas pour autant en situation d’impayés (ex. : « chèque-eau »).

Par ailleurs, en application de l’article 28, lorsque « l’aide au paiement des factures d’eau concerne la distribution d’eau et l’assainissement, ou a fortiori uniquement l’assainissement, une convention de mise en oeuvre de l’expérimentation est passée entre le service assurant la facturation de l’eau, les gestionnaires des services et les collectivités dont il perçoit les redevances ».

Fiche n° 3

Le travail préparatoire à la demande d’expérimentation (étude détaillée et note de présentation)

 

La demande d’expérimentation est l’aboutissement d’un travail de réflexion entrepris par une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales au sujet de l’accès à l’eau des plus démunis.

Ce travail de réflexion peut se concrétiser par l’élaboration d’une note de présentation générale et d’une étude détaillée. Cette fiche propose quelques éléments de contenu.

1) La note de présentation générale du projet d’expérimentation

Les collectivités territoriales ou les groupements de collectivités territoriales qui souhaitent participer à l’expérimentation prévue à l’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 sont invitées à produire une note de présentation générale de leur projet.

Cette note doit permettre de clarifier le projet d’expérimentation pour d’une part mener à bien la phase de candidature et d’autre part assurer un suivi optimal de l’expérimentation sur toute sa durée et permettre son évaluation. Elle compléterait ainsi utilement les informations présentes dans la (les) délibération(s) en application des articles L.O. 1113-1 à L.O. 1113-7 du CGCT (manifestation de candidature, dispositions dérogatoires envisagées et leur durée de validité).

La note de présentation pourrait, notamment, présenter les éléments suivants :
- rappeler les dispositions législatives en vigueur auxquelles il est proposé de déroger pendant la durée de l’expérimentation ;
- le contenu et les objectifs de l’expérimentation demandée (institution de tarifs spécifiques pour les bénéficiaires de minima sociaux, allocation « eau » versée à ces bénéficiaires, etc.) ;
- les organismes qu’il est prévu d’associer à l’expérimentation pour définir, mettre en oeuvre et évaluer l’expérimentation (ex. : constitution d’un « comité de pilotage ») ;
- les modalités d’association et de consultation des usagers des services concernés (eau et/ou assainissement) à l’expérimentation.

Cette note de présentation peut constituer une base utile pour la consultation de la commission consultative des services publics locaux, exigée par l’article 28 de la loi du 15 avril 2013, dès lors que sa constitution est requise en vertu de l’article L. 1413-1 du CGCT.

2) L’étude détaillée du projet d’expérimentation

L’étude détaillée permet de préciser les modalités de mise en oeuvre, les coûts prévisionnels et les impacts envisageables de l’expérimentation.

Cette étude peut, notamment, s’articuler autour des questions suivantes :
- quels outils utiliser (structure tarifaire, « chèque eau », écrêtement de la facture en fonction des revenus du foyer, etc.) ? En fonction de la nature de ces outils, les dispositions législatives auxquelles il sera nécessaire de déroger pendant la durée de l’expérimentation seront identifiées, dans la limite des dérogations identifiées par l’article 28.
- quels sont les impacts budgétaires des dispositions proposées mais également quels sont les coûts prévisionnels de gestion et d’attribution des aides ?
- comment concilier un objectif social avec un objectif environnemental de gestion d’une ressource naturelle limitée ? Comment concilier l’aide au paiement des factures d’eau et les incitations aux économies d’eau non seulement par les pratiques individuelles mais également par des équipements économes (robinets, lave linge plus performant, …) ?

L’étude détaillée du projet et le suivi de l’expérimentation pourront faire l’objet d’une demande de financement à l’agence de l’eau, et dans les départements d’outre-mer, à l’office de l’eau qui examinera alors les financements pouvant être mobilisés.

Fiche n°4

L’évaluation de l’expérimentation par la collectivité territoriale ou le groupement de collectivité
territoriale

 

 

Les collectivités territoriales ou les groupements de collectivités territoriales qui participent à l’expérimentation doivent assurer un suivi et une évaluation du dispositif mis en place, en application de l’article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013.

Cette expérimentation doit notamment être évaluée au sein du rapport annuel sur le prix et la qualité du service public régi à l’article L. 2224-5 du CGCT. Ce rapport, qui doit être présenté à l’assemblée délibérante au plus tard six mois après la clôture de l’exercice concerné, est examiné par la commission consultative des services publics locaux constituée en application de l’article L. 1413-1 du même code.

L’évaluation de l’expérimentation doit établir « une partie chiffrant les coûts de gestion rendus nécessaires par la mise en oeuvre du dispositif d'aide sociale, afin de les comparer au volume d'aides apportées ». En participant à l’expérimentation, la collectivité s’engage à rendre compte le plus exactement possible des coûts de définition, de déploiement et de gestion courante du dispositif expérimenté.

Un arrêté interministériel du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé de l'écologie, du développement durable et de l'énergie fixera les postes de coûts devant nécessairement figurer dans ce chiffrage.

Par ailleurs, cette évaluation peut utilement s’étendre à l’examen de l’efficacité de ces mesures, et être partagée au sein d’un comité de suivi rassemblant l’ensemble des partenaires.

La définition, en amont du projet, des modalités du suivi et de l’évaluation de l’expérimentation doit permettre d’assurer une évaluation pertinente.

La collectivité peut ainsi réfléchir aux points suivants :
- les montants annuels des aides attribuées pour le paiement des charges d’eau, en distinguant les aides attribuées à titre préventif aux foyers ayant les plus faibles revenus et les aides attribuées a posteriori aux personnes en situation de précarité, en distinguant les aides issues du FSL, les abandons de créance et/ou les admissions en non-valeur ;
- les coûts de l’expérimentation, en identifiant respectivement les coûts des études préalables de définition, les coûts de déploiement de l’expérimentation (aménagement des fichiers des abonnés, diffusion de l’information, etc.) et les coûts de gestion courante de ces aides. Ces coûts peuvent intégrer les dépenses en régie sur la base d’une évaluation du temps consacré à l’expérimentation par le personnel du service.

L’évaluation pourra également préciser les impacts des dispositions expérimentées sur les consommations d’eau des différentes catégories d’usagers. En cas de tarification progressive, il pourrait s’avérer pertinent de réaliser des enquêtes sur la mobilisation de ressources accessoires (récupération d’eau de pluie, puits ou forages privés).

Annexe : Loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes

Article 28

En application de l’article 72 de la Constitution, une expérimentation est engagée pour une période de cinq années à compter de la date de promulgation de la présente loi en vue de favoriser l’accès à l’eau et de mettre en oeuvre une tarification sociale de l’eau.

L’expérimentation peut inclure la définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer, l’attribution d’une aide au paiement des factures d’eau ou d’une aide à l’accès à l’eau, en application de l’article L. 210-1 du code de l’environnement.

Cette expérimentation est engagée par les collectivités territoriales organisatrices des services d’eau et d’assainissement, les groupements auxquels elles ont transféré cette compétence et les départements qui le demandent. La demande d’expérimentation est transmise au représentant de l’Etat dans le département concerné avant le 31 décembre 2014. Les collectivités territoriales demandant à participer à l’expérimentation en informent l’agence de l’eau ou, dans les départements d’outre-mer, l’office de l’eau.

Pour la mise en oeuvre de l’expérimentation, les collectivités territoriales et leurs groupements compétents en matière d’eau et d’assainissement sont autorisés à déroger :

1° Aux I et II de l’article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales, la facturation d’eau potable aux abonnés domestiques par les services concernés pouvant tenir compte du caractère indispensable de l’eau potable pour les abonnés en situation particulière de vulnérabilité en instaurant un tarif progressif pouvant inclure une première tranche de consommation gratuite.

La progressivité du tarif, pour les services concernés par l’expérimentation, peut être modulée pour tenir compte des revenus ou du nombre de personnes composant le foyer, le prix au mètre cube de la tranche de consommation supérieure ne pouvant toutefois excéder plus du double du prix moyen du mètre cube pour une consommation de référence fixée par arrêté des ministres chargés de l’environnement et de la consommation ;

2° A l’article L. 2224-2 du même code, les communes ou leurs groupements concernés par l’expérimentation pouvant contribuer à son financement en prenant en charge dans leur budget propre tout ou partie du montant de l’aide attribuée par le service pour le paiement des factures d’eau des foyers en situation de précarité ou ayant des difficultés de paiement de leurs factures d’eau ;

3° Au montant maximal de la subvention attribuée au fonds de solidarité pour le logement, prévue à l’article L. 2224-12-3-1 du même code, qui ne peut excéder 2 % des montants hors taxes des redevances d’eau ou d’assainissement perçues. A défaut d’intervention du fonds de solidarité pour le logement, le versement est réalisé au centre communal ou intercommunal d’action sociale pour la durée de l’expérimentation.

En application de l’expérimentation, le service assurant la facturation de l’eau peut procéder au versement d’aides pour l’accès à l’eau par les foyers ayant des difficultés de paiement de leurs factures d’eau et dont les ressources sont insuffisantes.

Lorsque l’aide au paiement des factures d’eau concerne la distribution d’eau et l’assainissement, une convention de mise en oeuvre de l’expérimentation est passée entre le service assurant la facturation de l’eau, les gestionnaires de services et les collectivités territoriales dont il perçoit les redevances.

Le projet d’expérimentation est présenté pour avis à la commission consultative des services publics locaux, qui est informée du déroulement et des résultats de l’expérimentation.

Peuvent être associés à l’expérimentation les gestionnaires assurant la facturation des services d’eau et d’assainissement concernés, le département, les agences de l’eau et, dans les départements d’outre-mer, les offices de l’eau, les associations de gestionnaires publics ou privés d’immeubles d’habitation, les associations de locataires, les organismes de gestion du logement social dans les collectivités territoriales concernées et, le cas échéant, les caisses locales d’allocations familiales gestionnaires des aides au logement.

Les organismes de sécurité sociale, de gestion de l’aide au logement ou de l’aide sociale fournissent aux services engageant l’expérimentation les données nécessaires pour établir la tarification sociale de l’eau ou attribuer une aide au paiement des factures d’eau ou une aide à l’accès à l’eau aux foyers dont les ressources sont insuffisantes, la Commission nationale de l’informatique et des libertés étant préalablement consultée en application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Le Comité national de l’eau est chargé du suivi et de l’évaluation de l’expérimentation. Il remet au Gouvernement, avant la fin de l’année 2015, un rapport décrivant les actions engagées dans le cadre de l’expérimentation et, avant la fin de l’année 2017, un rapport d’évaluation et de proposition, un rapport intermédiaire étant remis avant la fin de l’année 2016. Ces rapports sont transmis aux collectivités territoriales qui ont participé à l’expérimentation pour observations.

L’agence de l’eau et, dans les départements d’outre-mer, l’office de l’eau peuvent apporter des aides aux études de définition et de suivi de l’expérimentation, dans la limite de la moitié des dépenses.

L’Office national de l’eau et des milieux aquatiques prend en charge l’évaluation des expérimentations au plan national et apporte un concours financier aux offices de l’eau pour la réalisation des études dans les départements d’outre-mer, dans la limite d’un montant global annuel d’un million d’euros.

Les collectivités territoriales organisatrices des services d’eau et d’assainissement, les groupements auxquels elles ont transféré cette compétence et les départements qui le demandent ayant mis en place une telle expérimentation évaluent cette dernière au sein du rapport annuel sur le prix et la qualité du service public de l’eau potable prévu à l’article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales en établissant une partie chiffrant les coûts de gestion rendus nécessaires par la mise en oeuvre du dispositif d’aide sociale, afin de les comparer au volume d’aides apportées. Un arrêté interministériel du ministre chargé de l’économie et des finances et du ministre chargé de l’écologie, du développement durable et de l’énergie fixe les postes de coûts devant figurer dans ce chiffrage.

 

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